Nouvelles en Famille - 14 février 2011
Sommaire
- Le mot du Père général
- Le Père Etchécopar écrit...
- L'Incarnation: Dieu dans la faiblesse humaine 2/4
- Le premier chapitre de la Région saint Michel
- 5 minutes avec le P. Enrique Gavel
- In memoriam: P. Anthony Box (1932-2011)
- La vie extraordinaire de Sur Marie (2)
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Le mot du Père général
Tout ma été confié par mon Père (Mt 11,27)
Dans lÉvangile de la fête de saint Michel Garicoïts, jai trouvé cette phrase qui ma fait réfléchir et qui est comme la clé de compréhension de la personne de Jésus et de son message. Parce que tout lui a été confié par le Père, Jésus se sent petit, et il est ému de voir lamour de préférence que le Père porte aux petits ; il est fier dêtre le seul à connaître le Père ; il a le secret pour soulager ceux qui sont fatigués de vivre ; il invite à être simple, doux et humble, au lieu décraser les autres pour imposer ses idées, ou pour accumuler richesses et honneurs en passant à côté des choses simples.
Jésus est modèle de la relation à avoir au Père. Il sagit dune identification et dune communion de tous les instants avec Lui. Je ne peux rien faire de moi-même
je ne cherche pas à faire ma propre volonté, mais la volonté de celui qui m'a envoyé. (Jn 5,30) Mon enseignement n'est pas le mien : c'est l'enseignement de celui qui m'a envoyé. (Jn 7,16- 17) Si vous me connaissiez, vous connaîtriez aussi mon Père. (Jn 8,19) Je ne fais rien par moi-même, mais tout ce que je dis, c'est le Père qui me l'a enseigné. (Jn 8,28) Je ne suis pas venu de moi-même ; c'est lui qui m'a envoyé. (Jn 8,42) Celui qui m'a vu a vu le Père... Le Père demeure en moi, et accomplit ses propres uvres. (Jn 14,9-10)
De par cette identification au Père, Jésus na rien en propre. Son visage, sa parole, sa mission, sa volonté, ses intérêts, ses idées, ses projets, ses uvres sont ceux du Père. Cest le fondement de la pauvreté évangélique : être conscient, comme Jésus, que rien de ce que je suis, ce que jai et ce que je vaux nest à moi, mais que je lai reçu de lamour du Père.
Dans la Bible, quiconque rencontre le Seigneur fait une double expérience : lamour de Dieu, sa propre fragilité. Mon Dieu, je ne sais pas parler, je ne suis qu'un enfant ! (Jr 1,6) Je suis un homme aux lèvres impures
(Is 6,5) Seigneur, c'en est trop ! Reprends ma vie: je ne vaux pas mieux que mes pères. (1R 19,4) Mon âme exalte le Seigneur... Il s'est penché sur son humble servante. (Lc 1,46.48)
Saint Michel aussi a fait cette expérience exprimée dans le: Dieu tout, moi rien ! (DS 74-75) Le témoignage du P. Etchécopar nous aide à mieux le comprendre : le Père Garicoïts croyait que le Dieu des petits et des pauvres lavait choisi à cette fin, lui, le pâtre de la dernière maison du hameau dIbarre, lui, un massacre, un néant, et quil lui avait dit : « Va fonder dans mon Eglise un nouvel Institut ; il a sa raison dêtre dans ces temps troublés, où les grands Ordres sont dispersés et où lesprit de lindépendance révolutionnaire pénètre de tous côtés jusque dans le Sanctuaire
Tu marcheras à la tête, avec le drapeau du Sacré-Cur, en poussant le cri, lEcce Venio de mon Fils, et vous serez sa joie et le soutien de son Eglise ». Il crut à cette voix ; il saisit ce drapeau,
Et il sélança dans la carrière, comme un géant, et y marcha jusquà la fin de sa vie. Fut-il, mes Pères et mes Frères, la victime dune généreuse illusion ? Non, non, grâce à Dieu
les faits le prouvent
(Lettre circulaire, 10 janvier 1888).
Le film Des dieux et des hommes rend très bien lessence théologale de la vie religieuse. Au début du discernement pour savoir si la communauté doit partir ou rester, en ces circonstances extrêmes, lun des moines affirme : « Je reste : personne ne mattend ». Et le Père Abbé, dans le dialogue quil a avec un des religieux partisan de sen aller, lui dit : « Le martyre peut sembler une folie, comme semble fou de se faire moine
ta vie, tu las déjà donnée à Jésus. » Voilà les vraies raisons de notre consécration, qui montrent que Jésus et son Royaume sont pour nous lunique nécessaire, notre seul trésor.
Conscients de notre petitesse et de lamour que Dieu a pour elle, nous avons donné notre vie à Jésus ; nous savons quà travers elle, dans nos fragilités mêmes, il peut faire de grandes choses pour étendre son Royaume et que tous les hommes, en reconnaissant Dieu pour Père, se comportent comme des frères. Ce nest que par la conscience de notre petitesse, la confiance en lamour de Dieu et loffrande de nous-mêmes, que nous pouvons nous rendre indifférents à vouloir telle ou telle chose, et ne la désirer que si Dieu le veut.
Ainsi seulement, on est prêt à perdre sa vie, si Dieu le veut, et à rester fidèles dans les épreuves en se fiant à la Providence. Ainsi seulement on se donne à la mission, pas pour soi mais pour les autres, pas comme un projet personnel, mais ecclésial, pas pour gagner en prestige mais pour faire le bien. Ainsi seulement serons-nous pauvres, chastes, obéissants, parce que Jésus est notre seule richesse, lobjet de notre fierté et la garantie de notre liberté. Ainsi seulement serons-nous capables de vivre la communion, car nous serons prêts à recevoir de nos frères pour devenir meilleurs et donner le meilleur de nous-mêmes pour que le frère grandisse. Ainsi seulement agirons-nous avec la conviction que limportant nest pas que tout aille selon nos vues pour que être reconnu, mais que la volonté de Dieu soit faite, même si cela nous bouscule. La conséquence de tout cela nest pas lamertume, mais la joie de goûter lessentiel : le tendre amour de Dieu, laccomplissement de sa volonté et lextension de son Royaume.
Le 14 mai à Bethléem, dans trois mois, souvrira le Chapitre général. Dans la prière préparée en vue de cet événement dÉglise, nous demandons au Verbe incarné, né à Bethléem, que tous les délégués aient de tels sentiments et que lassemblée capitulaire aide les religieux de la Congrégation à les vivre en chacune de nos communautés de par le monde.
Gaspar Fernandez,SCJ
Le Père Auguste Etchécopar écrit...
au P. Jean Magendie (à Buenos Aires), le 3 Février 1882
Dieu soit béni des ordinations !! Ces Prêtres sont dautres Jésus-Christ donnés à lÉglise et à Bétharram, pour la gloire de Dieu et la sanctification des âmes ; quels trésors infinis nous venons dacquérir !!
Dieu soit béni des succès de lannée passée et des espérances du présent ! Quil vous soutienne tous et supplée au petit nombre par les joies de la ferveur et par la paix promise aux hommes de bonne volonté.
Je voudrais écrire à tous ; aux anciens, qui sont des colonnes par leur persévérance dans tous les genres de vertu ; aux jeunes, qui se rendent dignes de leurs devanciers par leur progrès en ce qui caractérise, manifeste et fait estimer les vrais membres du Sacré-Cur de Jésus.
Depuis près de deux mois, je suis un peu faible et les affaires me prennent ce qui reste de forces. Je me borne donc à vous dire à tous, avec le P. Garicoïts, au début du nouvel an :
1° Ayez avant tout, Dieu et son adorable volonté, constamment sous vos yeux.
2° Et pour aller à Dieu et comme expression de sa volonté, notre règle et nos Constitutions.
3° Aller à cette fin par ce moyen, selon toute létendue de votre grâce et des devoirs de votre position ; puis en respectant les limites de lune et de lautre avec une délicatesse virginale.
Méditez chaque mot ! et que Notre Dame vous bénisse !
À Elle notre vie, pour sa plus grande gloire !
Tout à vous en N. S.
Etchécopar
Préparation spirituelle au Chapitre général

LINCARNATION : DIEU DANS LA FAIBLESSE HUMAINE
2. La Kénose (Ph 2,6-11) : lhumilité de Dieu
![]() | Le Tout-Puissant a voulu partager notre faiblesse en prenant la condition humaine : tel est le mystère merveilleux de lIncarnation, centre de notre spiritualité. Le charisme de Bétharram, "lEcce Venio du Cur de Jésus" est un trésor incomparable; il nous est donné mais nous le portons dans des "vases dargile". |
Labaissement du Fils de Dieu, son dépouillement au moment de lIncarnation, nous est indiqué par la célèbre hymne aux Philippiens qui est le fondement de toute méditation sur le comportement voulu par Dieu au moment de lentrée de son Fils dans le monde des hommes : « il ne retint pas jalousement le rang qui légalait à Dieu » ou « il na pas revendiqué son droit dêtre traité comme légal de Dieu », « mais il sest dépouillé (anéanti), prenant la condition desclave. »
Le Fils était bien légal de son Père, de la même condition divine ; il était en droit de revendiquer des privilèges denvoyé de Dieu, comme un ambassadeur a droit aux honneurs qui sont dus à celui qui lenvoie ; au lieu de cela, il sest soumis en tout à la condition de sa naissance humaine, voulant être traité comme un serviteur de Dieu qui se fait lesclave de ses frères, prenant en tout leur condition pour leur communiquer la sienne. Dès le premier instant, Jésus est dans un état choisi de soumission et dabaissement, de total renoncement à sa volonté propre et de totale disponibilité à la volonté de son Père. Il a tout accepté comme venant de son Père, y compris sa mort sur une croix.
Bethléem veut nous réconcilier avec cette faiblesse et cette fragilité que nous découvrons en nous et qui pourraient parfois nous révolter contre ce Créateur qui aurait été bien peu généreux envers nous. Lincarnation nous apprend que la grandeur de lhomme ne tient pas à sa force et à sa puissance mais à sa capacité de se donner : « En contemplant Jésus à Bethléem, dit Jean Vanier, nous redécouvrons un Dieu qui sabaisse vers nous. Nous devons donc comprendre que le caractère divin en chacun dentre nous nest pas tant notre capacité de dépassement qui pousse à nous élever au dessus des autres, mais bien la faculté que nous avons de nous abaisser, de servir par amour, de nous faire pauvres avec les pauvres ». Le P. Varillon nous propose aussi un chemin de pauvreté pour ressembler à Dieu manifesté à Bethléem : « Nous nentrerons en Dieu que lorsque nous serons dépouillés de tout avoir. La pauvreté matérielle de Bethléem et Nazareth nest que le signe dune pauvreté beaucoup plus profonde. Pauvreté immense de Dieu, infinie, absolue, sans quoi nous ne pouvons pas dire que Dieu est amour
Le Dieu en qui nous croyons est infiniment humble, autrement dit, il est dépouillé de tout prestige. Le prestige est toujours linessentiel. Il y a en nous un certain besoin de prestige, de toc, de faux qui nexiste pas en Dieu. Dieu est la plénitude de lhumilité. »
Bethléem nous apprend que le vrai visage de Dieu se dévoile dans la faiblesse et lhumilité. Dans son humilité, Dieu ne simpose pas ; il accueille lautre sans le prendre ni le posséder, en lui laissant toujours sa liberté. Notre Fondateur, Saint Michel Garicoïts a bien développé cette force de lamour de Dieu qui agit avec humilité. Dans le Manifeste, son texte fondamental, cette force nous est présentée comme « attrait qui nous gagne à lamour divin, modèle qui nous montre les règles de lamour et moyen de parvenir à lamour divin. »
« Le voilà dans la crèche et sous les voiles eucharistiques. Cest une manifestation faite à tous, une école ouverte à tous ceux qui ont des yeux pour voir et des oreilles pour entendre. Quelle école ! Quel Maître ! Quelle force et quelle douceur dans les enseignements de la crèche ! Quels attraits infinis pour gagner les plus grands pécheurs ! » «
telle est la conduite de Notre Seigneur dans son Incarnation. Dans ce touchant mystère, il est pour les âmes un appât, un modèle, un soutien ; il nous attire, il nous éclaire, il cherche à mettre nos curs sous la loi de son amour ; mais, en définitive, il sollicite et ne force pas : ce quil lui faut, ce sont des âmes de bonne volonté. » (D.S. 359) à suivre
Laurent Bacho,SCJ
extraits de la récollection à la Fraternité Nè Mè (18/12/2010)
Bétharram

Le premier Chapitre de la Région saint Michel
Du 13 au 18 janvier 2011, une trentaine de religieux venus de France, dEspagne, dItalie, de Côte dIvoire, de Terre Sainte et du Centrafrique se sont réunis à Bétharram pour leur chapitre régional. Ce fut un temps découte et de dialogue; un temps pour rencontrer des frères qui portent avec eux les expériences, les appels, les soucis et les attentes des différentes communautés; un temps extraordinaire pour faire lexpérience que la Parole et la Volonté de Dieu se disent à travers la parole et les attentes des autres, même si ce nest pas toujours évident...
Les rapports des supérieurs de Vicariat ont été importants. Important aussi celui du Supérieur régional. Importante enfin la méditation proposée par Sur Marthe, la supérieure générale des Filles de la Croix. En partant de lÉvangile de lAnnonciation (Luc 1,26-38), elle nous a ramenés à la source: en Jésus, Dieu sincarne pour nous faire comprendre quon ne doit pas gâcher la grâce quil nous fait. Dieu prend linitiative de venir jusquà nous. Cest Lui qui vient... Aussi devons-nous prendre le temps découter, daccueillir, daimer Dieu, de le laisser faire
Il nous étonnera toujours !
Dès le premier jour, tous les participants se sont sentis coresponsables du travail de relecture et de renouvellement de la vie communautaire. Sa portée en a été amplifiée par le fait que ce chapitre régional était le premier du genre après la réorganisation de la Congrégation : aux Provinces ont fait place les Régions subdivisées en Vicariats. Doù linternationalité de cette assemblée qui a ouvert lhorizon des communautés locales à des réalités plus vastes et plus complexes. Et puis, le succès dun chapitre dépend aussi, et surtout, de la bonne volonté de chacun, et de lengagement de tous pour le bien de lensemble.
Les sujets suivants ont été abordés : animation vocationnelle et formation initiale ; vie fraternelle, formation permanente et ouverture aux laïcs ; internationalité et animation missionnaire ; organisation du gouvernement et économie de la Congrégation ; communication et relations mutuelles. Au lieu de verser dans des échanges formels sur la gestion et lefficacité des structures, on sest efforcé dorienter le débat sur la personne du religieux et son quotidien. En sont issues les motions et propositions qui seront soumises au prochain chapitre général. Certes, la tentation était là de ne rien régler, de ne rien imaginer de neuf et de différent pour le futur proche: le risque existait de se résigner à perdre du temps sur des tâches provisoires et de moins en moins claires, vu la raréfaction des vocations et lessoufflement des forces en Europe. Mais des hommes de Dieu ne sauraient se laisser conditionner par la peur et le manque de confiance en lavenir. Lavenir se construit en pensant, comme le Fr. Émile, que « le charisme du fondateur nest pas la propriété des Pères et des Frères, il est pour tous ; et chacun de nous se doit de le vivre pour que dautres le découvrent et soient gagnés par lui. »
Le rapport du Supérieur régional a été reçu et repris dans les carrefours, notamment linvitation adressée « aux religieux et aux communautés de lever les yeux pour regarder au-delà du particulier et entrer dans une vision densemble ». Les capitulants avaient conscience dêtre à un tournant, difficile à négocier, de leur histoire. Devant le peu de lisibilité de la vie consacrée dans une société culturellement athée, pleine de préjugés sur la moralité et la cohérence de vie des religieux et des prêtres daujourdhui, les Bétharramites savent, daprès le P. Graziano, quil faut « donner une plus grande force aux réalités locales
il faut aussi que les religieux et les communautés se sentent engagés dans un parcours commun
en nourrissant une sincère disponibilité à participer aux projets communs
»
Doù la conviction que la période où nous sommes peut être loccasion providentielle de retrouver et de proposer notre ministère sacerdotal et religieux, à lintérieur de lÉglise, avec la force de lespérance. Naturellement, tout cela conduit à examiner notre situation présente et à suggérer des réponses concrètes aux questions pendantes : comment assurer aux frères de communauté un engagement apostolique quils puissent assumer ? Comment promouvoir, là où nous sommes, la connaissance de Bétharram, de son travail de promotion humaine et déducation, dans une optique vocationnelle ? Comment faire face aux nouvelles pauvretés et aux situations durgence ? comment permettre aux confrères dacquérir une compétence professionnelle dans des apostolats spécifiques ? comment inciter les communautés qui ont des apostolats similaires à collaborer, et comment les accompagner en ce sens ? comment remodeler les communautés qui manifestent des signes de fatigue et de routine apostolique ? comment définir les responsabilités individuelles à lintérieur dun projet communautaire partagé ? comment sorganiser du point de vue économique, à tous les niveaux ? comment favoriser une plus grande participation et coresponsabilité aux laïcs en leur offrant des postes de gestion et de direction dans les uvres et activités où les religieux ne sont plus présents ?
Répondre à ces questions est tout sauf facile, et le chapitre général de Bethléem, en mai prochain, ny suffira sans doute pas. Mais il ne faut rien négliger. Lhistoire nous lapprend, à travers la réponse de Marie à lannonce de lAnge : Fiat voluntas Dei. Saint Michel Garicoïts, notre père fondateur, lui fait écho avec son "Me voici", complété par le fameux : "sans retard, sans réserve, sans retour". Dans la réponse de Marie à lange comme dans la disponibilité de saint Michel, tout Bétharramite peut trouver les mots pour exprimer quil est conscient de ses limites, tout autant que de la force que Dieu confère à celui qui croit et se confie en Lui. Nous nous laisserons guider par les événements, les personnes, et Jésus que Dieu nous a donné. Nous nous laisserons convaincre comme les bergers, la nuit de Noël, pour partir et annoncer ; comme les mages qui ont pris une autre route au retour, parce quils ont vu et cru. Nous nous laisserons convaincre que, pour vivre pleinement notre vocation, il ny pas dautre choix que de se mettre au service de Dieu en partageant à tous cet Amour dont les Bétharramites se savent capables.
Angelo Riva,SCJ
5 minutes avec... le Père Enrique Gavel

Les premiers missionnaires de Bétharram en Amérique ont fait escale à Montevideo le 3 novembre 1856, et débarqué à Buenos Aires le lendemain. Quatre ans après, le P. Jean-Baptiste Harbustan traversait le Rio de la Plata dans lautre sens pour prendre en main la chapelle dite des Basques (Vascos). En 1867 était fondée lécole de lImmaculée Conception... Cette histoire séculaire continue. En témoigne un Bétharramite dUruguay: le Père Enrique Gavel.
Nef: Pouvez-vous nous raconter lhistoire de votre vocation?
- Tout a commencé avec un gamin que sa grand-mère conduit par la main pour devenir enfant de chur à léglise dite des Basques, lImmaculée Conception de Montevideo. Il a à peine huit ans ; le P. Louis Marcel lui pose cette question : Veux-tu être prêtre ? Et il répond avec enthousiasme : Oui.
Deux ans plus tard, après une première année au collège des Basques, lappel mûrit progressivement en Argentine, à lapostolicat de Barracas, puis se fortifie au scolasticat dAdrogué. Les vux perpétuels confirment cette vocation, il y aura 50 ans le 1er mars prochain; son couronnement, cest lordination sacerdotale conférée dans cette même église des Basques, fin 1963.
Vous avez été de longues années directeur du collège de Montevideo ; aujourdhui, vous êtes curé de paroisse. Comment décririez-vous votre vie de prêtre?
- Depuis mon ordination sacerdotale en 1963 jusquen 2008, jai toujours exercé mon ministère dans des collèges (Buenos Aires, Montevideo, Rosario). Javais la responsabilité de lenseignement, de la discipline et de ladministration, et jétais aidé du point de vue pastoral par des prêtres de paroisse. Du fait des circonstances dune uvre couplant le collège et la paroisse, je me retrouve seul en charge de la paroisse. En tant que prêtre, y exercer son ministère est une bonne expérience. Dommage quil ny ait personne pour partager cette tâche enrichissante.
Comment se présente votre milieu pastoral, du point de vue socio-économique?
- La paroisse Saint-Michel Garicoïts (avec léglise de lImmaculée Conception) couvre 53 pâtés de rue au cur de Montevideo. Soit 6500 habitants, la plupart appartenant à la classe moyenne. De par sa situation en centre-ville, notre église est fréquentée par des adultes relativement âgés. On compte les jeunes sur les doigts de la main aux deux messes quotidiennes, attirant entre 25 et 40 fidèles. Le dimanche, chacune des deux célébrations regroupe environ 200 personnes. En revanche, cette église bien placée reçoit beaucoup de gens de passage.
En 2010 on a célébré les 140 ans de la paroisse; en 2011 on commémorera 150 ans de présence des « Prêtres basques » en Uruguay ? Quel sens cela a-t-il pour vous ?
- Une précision : nous avons fêté le 140e anniversaire de linauguration de léglise (en 1870), car la paroisse a été érigée plus récemment, en 1931. Toujours est-il que ce fut loccasion de rappeler, notamment par une publication, aux agents pastoraux, aux paroissiens en général et au diocèse en son entier, les débuts des activités de Bétharram en Uruguay.
En même temps, il reste un arrière-goût amer, quand on pense quon a failli abandonner la paroisse (à lassemblée provinciale de 2007) ; que le nombre de religieux est très réduit : en plus de votre serviteur (70 ans), il y a le P. Ruiz (80 ans) et le Frère Enrique (90 ans), tous deux très malades ; et quà court terme, on nentrevoit aucun renfort possible. Autant déléments qui font sinterroger sur le genre de festivités que nous aurons en 2011.
Depuis des années, Bétharram na plus de vocations en Uruguay ; une pastorale vocationnelle reste envisageable ?
- Vu la composition de la communauté paroissiale, la possibilité dune pastorale des vocations doit se centrer sur le collège, où les jeunes ne sont pas si nombreux (150 garçons). Une seule certitude : il faudrait larrivée dun prêtre jeune pour donner cette impulsion...
Auriez-vous un message pour vos frères de la Congrégation?
- Plus quun message, je voudrais exprimer mon désir : que saint Michel nous envoie le signe clair que cette mission dUruguay, lancée par lui, doive continuer.
Y aura-t-il un Bétharramite prêt à relayer ce désir ?...
In memoriam | Angleterre: P. ANTHONY BOX,SCJ
Oldbury, 10 décembre 1932 | Olton Solihull, 7 janvier 2011
Mon premier souvenir de Tony Box remonte à 1969, peu de temps après sa nomination en paroisse sur la côte du Hampshire. Il sétait pris de passion pour la pêche, et sentraînait au lancer sur le terrain de football de Sambourne (maison de formation de 1961 à 1978). Certains coups dépassaient 80 mètres. Je me souviens mêtre dit quil devait être très mordu de pêche pour sentraîner, avec une canne, à plus de 200km de la mer.Tony Box est né à Oldbury dans le Black Country, là où la révolution industrielle a démarré en Angleterre, une terre de mines de charbon, de hauts-fourneaux et dusines métallurgiques. Il appartenait à une famille catholique traditionnelle de milieu modeste ; après la deuxième guerre mondiale, ses parents étaient ravis de voir leur fils unique entrer à lécole apostolique du Sacré Cur dirigée à Tenbury Wells, par le P. Alec Biggert,SCJ. Loncle de Tony, Cyril Hazelwood,SCJ venait dêtre ordonné à Bethléem et son cousin, Cyril Barlow, avait commencé sa formation au séminaire diocésain de Birmingham.
Tony est passé par trois séminaires de courte durée, Tenbury Wells, Fritham et Caerdeon, avant dêtre ordonné en 1957 à lOratoire de Birmingham, en même temps que le P. Ted Simpson,SCJ. Comme il peinait dans ses études, le P. Jack Waddoups,SCJ le choya et lencouragea tout au long de son cursus de philosophie et de théologie. À Caerdeon il acquit un savoir-faire pratique en plomberie, menuiserie et mécanique : cela aida à survivre un séminaire à court dargent. Son père, coiffeur de profession, et lun des rares parents de scolastique à avoir une voiture, rendait visite de temps en temps à la communauté ; il apportait des cadeaux qui consolaient la communauté du froid et de lhumidité du Pays de Galles. Les séminaristes savaient que Charles Darwin avaient écrit dans leur maison (Caerdeon Hall) une partie de « LOrigine des espèces », et ils avaient lhabitude de dire, non sans humour noir, quils comprenaient pourquoi.
Après son ordination, le P. Tony est resté un an à Caerdeon pour essayer de décrocher quelques certificats denseignement, puis il a passé un an à Bétharram pour donner un coup de main à lécole primaire. Dans les années 60 il était professeur des petites classes, à Droitwich ; avec le recul, il a reconnu que cette expérience lui avait beaucoup apporté, même sil a toujours eu le sentiment que lenseignement nétait pas son fort.
Lorsque Mgr Derek Worlock nous a proposé une paroisse dans le diocèse de Portsmouth, en 1969, on a demandé à Tony de répondre à lappel ; cest ainsi quavec le P. Philip Ilsley,SCJ il sest installé sur la côte, à St.Columbas Bridgemary. Les 10 ans qui ont suivi ont probablement été les plus créatifs de sa vie : il exerça son ministère auprès de paroissiens aussi divers que de jeunes marins et des collégiens. Certains amis quil sétait fait alors le sont restés tout au long de sa vie - lun deux, qui possédait un bateau, avait même lhabitude de lemmener en mer pour des parties de pêche.
Limage de Jésus appelant ses disciples au bord du lac de Galilée signifiait beaucoup pour lui ; aussi, quand il fit une sortie sur ce même lac, à loccasion dun pèlerinage en Terre Sainte, il en fut ému aux larmes. Pendant quelque temps, Tony sest enthousiasmé pour le mouvement « Ministry to Priests » (un groupe dentraide mutuelle du clergé), puis ses amis ont remarqué en lui une certaine lassitude. Il semballait facilement pour un lieu, un projet ou une paroisse, et au bout de quelques années, il n'avait de cesse de sen aller. Les affectations suivantes à Fegg Hayes (Stoke-on-Trent), à la paroisse de Droitwich et à celle du Saint-Nom de Jésus à Great Barr ont confirmé cette tendance.
Plusieurs familles lont pris en affection et ont pris soin de lui. La famille Leigh en particulier sest occupé de lui quand il était en paroisse ; de même la famille Dwyer dans sa vieillesse. Bien quil ait eu du mal avec les études et ne trouvait pas de goût à enseigner, il passait étonnamment bien dans la catéchèse paroissiale. Les paroissiens de Bridgemary et Fegg Hayes se rappellent avec gratitude sa façon simple de transmettre lÉvangile et de rendre abordables des questions compliquées. Le mouvement catéchétique de laprès Vatican II avait pris tout son essor dans le diocèse de Portsmouth, et Tony avait été fortement inspiré par ses têtes pensantes au L.S.U. College of Education.
Avec le nouveau millénaire, la santé de Tony a décliné rapidement ; aussi, après quelques hésitations, ses supérieurs ont accédé à sa demande de se retirer du ministère à 69 ans, et de vivre parmi ses anciens paroissiens, dans le climat plus sain du bord de mer. Il a vécu en paix ces 10 dernières années, malgré la dégradation de son état physique et mental. En mars 2010, un accident vasculaire cérébral lui a fait réaliser que ni lui ni ses paroissiens ne pourraient tenir plus longtemps dans ces conditions ; et la communauté dOlton la accueilli comme lenfant prodigue. Huit mois durant, les frères de la communauté se sont dévoués sans compter auprès de lui. Début décembre, il a été hospitalisé pour diverses affections potentiellement mortelles, y compris une maladie cardiaque grave. Il est mort le 9 janvier dun arrêt du cur, entouré des Frères Andrew et Liam. Maintenant, il est réuni à Pierre et aux autres disciples: tous des pêcheurs !
Austin Hughes,SCJ

2. LE DRAME D'ALEXANDRIE
En 1854, loncle alla sinstaller à Alexandrie avec sa famille, donc aussi Mariam. Celle-ci, en ses 7 ans, se confessait chaque samedi. Brûlant de communier, elle se glissa parmi les autres enfants et vola ainsi sa première communion. Le curé lui permit ensuite de continuer, avec discrétion.
Quand elle eut 13 ans, son oncle, sans la consulter, fixa son mariage, la destinant à un autre oncle. Quand sa tante la mit au courant de la chose et des obligations du mariage, elle fut bouleversée. La voix dAbellin lui remonta impérieuse au cur. Résolue à se garder à Jésus, elle passa la veille de sa noce en prière devant licône de la maison puis, saisie dune joie inconnue, elle coupa les tresses de ses cheveux et les entremêla avec les bijoux reçus. Ce fut un drame; mais malgré colères et gifles, elle maintint son propos de virginité et sut résister à toutes les objurgations de son curé, même dun évêque ami de la famille. De ce moment, loncle la traita en petite esclave et son curé lui refusa labsolution; tous désormais lui furent de glace.
Hantée, dans cet abandon, de revoir son frère, mais ne sachant pas écrire, elle dicta pour lui une lettre et alla trouver en cachette un ancien domestique musulman de la maison, qu'elle savait en partance pour Nazareth. Bien accueillie par lui, elle raconta toutes ses misères chez son oncle. Le musulman lui conseilla alors, pour en finir, de laisser la religion impitoyable des siens et de se convertir à lIslam. Elle protesta alors avec une telle véhémence que lhomme en devint violent et, hors de lui, la jeta à terre et lui ouvrit la gorge dun coup de cimeterre. La croyant morte, baignant dans son sang, il lenveloppa dun voile et alla la jeter dans une ruelle obscure. Ce fut dans la nuit du 7 an 8 septembre 1858.
Obligée plus tard par obéissance de raconter son martyre, Mariam dit que morte et ravie au ciel, elle sentendit dire que « son livre nétait pas achevé ». Elle se retrouva dans une grotte où lavait portée une mystérieuse femme aux habits bleus qui lui avait recousu le cou, lui servit une « soupe délicieuse » et lui annonça son avenir: elle ne reverrait plus sa famille, irait en France, serait enfant de saint Joseph, puis fille de Sainte Thérèse, prendrait lhabit du Carmel dans un monastère, ferait profession dans un autre et mourrait dans un troisième, à Bethléem. Elle la conduisit ensuite, au bout dun mois, guérie, dans une église des Franciscains. La cicatrice de son cou, seul élément contrôlable de lévénement, fut bien vue à Marseille, Pau et Bethléem. Elle avait 10 centimètres de long et un de large. Le coup avait dû toucher la trachée, expliquant sa voix brisée fort curieuse.
Seule à 13 ans dans Alexandrie, Mariam, grâce à un Père franciscain, eut une place de domestique dans une famille chrétienne, qui se trouva être de parents éloignés, dont elle ne se fit pas connaître. Elle fut vite choyée pour son service parfait Se trouvant trop appréciée, elle passa dans une autre famille plus pauvre et se dévoua aussi à des malheureux.
Pierre Médebielle,SCJ
Jérusalem (1983, pp. 201-239)
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