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14/10/2016

La Règle vécue

La formation permanente : un chemin de conversion

La Règle vécue

Les moines de l’ordre bénédictin ne prononcent que deux vœux : stabilité et conversion. La stabilité signifie qu’ils seront fidèles à la Règle de saint Benoît dans un monastère particulier. La conversion signifie qu’ils ne cesseront jamais de tendre à la sainteté, en apprenant de leurs erreurs ou en gagnant en sagesse. C’est pourquoi le mot « conversion » est celui qui convient le mieux pour décrire le chemin bétharramite de la formation permanente.

Article 171. Cette formation est nécessaire tout au long de la vie ; chacun en demeure l’agent principal. Elle permet de progresser dans la vie spirituelle, d’affronter les problèmes personnels et ceux de notre temps dans une conversion constante à l’Évangile. Elle favorise le renouvellement dans les activités apostoliques.

Il est loin le temps où l’on pensait que la profession perpétuelle mettait un point final à la formation. L’histoire d’une vie est le récit d’un processus de formation, de ce que l’on apprend à travers nos erreurs, de la sagesse et des connaissances acquises, de tout ce que l’on approfondit sur notre amour pour le charisme de saint Michel.

Les pères fondateurs de notre ancienne Vice-Province d’Angleterre, dont nous nous souvenons tous avec beaucoup d’affection… le P. Jack Waddoups… le P. Frank Dutton… le P. Percy Collier…, tous se considéraient « en formation » jusqu’à la fin de leur vie.

Dans la période qui suit les vœux perpétuels, la formation permanente est, pour les jeunes religieux, une période exaltante, avec de nouvelles compétences liturgiques à acquérir, de nouveaux ministères à maîtriser, de nouveaux défis missionnaires à relever. J’ai une grande admiration pour nos jeunes frères indiens et thaïlandais, quand je les vois s’élever à la hauteur des défis qui les attendent, se consacrer avec passion aux tâches qui leur sont confiées, ce qui comporte souvent l’apprentissage d’une nouvelle langue et l’immersion dans une nouvelle culture. L’exemple des jeunes Thaïlandais qui sont partis pour la mission en Inde, au Vietnam ou en Europe a été une source d’inspiration, comme l’a été l’exemple des jeunes Indiens qui sont partis au Vietnam, en Israël et en Europe. L’Inde est un pays tellement grand que partir dans l’État de l’Assam, avec ses innombrables tribus et langues, c’est comme s’aventurer dans un autre pays.
Dans chaque vicariat, les nouveaux supérieurs ont accepté leur tâche avec générosité. C’est là aussi une sorte de formation. Par le passé, à l’époque où les communautés étaient très nombreuses, 20% uniquement des religieux devenaient Supérieurs. Aujourd’hui, avec des communautés plus petites, tôt ou tard, environ 80% des religieux se verront confié ce service.

Il faut reconnaître aux supérieurs de communauté le mérite d’avoir donné la priorité à la vie communautaire, à la prière communautaire, à la caisse commune, à la mission commune, au partage des expériences. Au niveau du Vicariat, des rencontres de prière et de partage sont organisées régulièrement. En Thaïlande, les religieux se rencontrent tous les deux mois à Chiang Mai. En Inde, ils se retrouvent presque chaque mois à Shobhana Shaakha, et en Angleterre cinq fois par an à Nymspfield.

Dans tous les Vicariats de notre Région, les diocèses nous apprécient pour le travail accompli ; il arrive souvent que nous prenions en charge des missions que les prêtres diocésains hésitent à accepter. Mais il reste encore du travail à faire pour convaincre les évêques de ne pas fragmenter nos communautés. Une pression naît parfois lorsqu’un évêque décide de diviser en deux paroisses une mission bétharramite bien engagée ou lorsqu’une directive diocésaine n’accorde un salaire qu’à un prêtre seulement d’une communauté.

Notre Règle de Vie aux paragraphes 171-175 encourage la formation permanente et donne aux supérieurs et à leurs conseils un rôle de supervision, pour que telles directives soient appliquées. Dans les trois vicariats, il existe des programmes de formation permanente nationale ou diocésaine pour les prêtres et les religieux, et nos confrères, en Thaïlande en particulier, ont pu en bénéficier.

L’Église en Inde, avec ses effectifs plus nombreux, offre un vaste choix de programmes, qui attirent même des candidats de l’étranger.

Chaque semaine, Tablet [hebdomadaire britannique catholique ndt] publie des programmes de ressourcement à l’attention des religieux du Royaume-Uni. Ils sont menés par les rédemptoristes, les jésuites ou les clarétains, etc, et quelques membres de notre Vicariat d’Angleterre y ont participé au cours des années.

Par expérience, je peux dire que personne n’affronte un programme de formation avec enthousiasme, si celui-ci n’est pas perçu comme un besoin. Un programme, aussi structuré soit-il, sera une perte de temps si les participants n’éprouvent pas la nécessité de le suivre.

Mais alors comment accueillir ce besoin de formation permanente ? En premier lieu, on peut s’ouvrir à l’idée de la formation en cultivant la spiritualité de la « force dans la faiblesse ». Nous connaissons bien ces mots de saint Paul : « lorsque je suis faible, c’est alors que je suis fort » (2 Cor 12,10)  ; mais les mettre en pratique dans le quotidien signifie aller à contre-courant de la culture dominante qui, dans nos trois vicariats, valorise l’indépendance et l’autosuffisance. Par bonheur, même si notre culture, ou notre caractère individuel, peut nous donner l’impression de nous suffire à nous-mêmes, nos expériences de vie nous racontent bien vite une toute autre histoire. Dans notre ministère, nous nous apercevons très vite que, malgré les belles notes obtenues au cours de théologie morale, nous n’avons pas toutes les réponses aux situations des gens. Nous apprenons vite aussi que le rythme de prière et de méditation, que nous trouvions aisé au séminaire, est plus difficile à maintenir au milieu de nos activités pastorales et que notre condition spirituelle peut facilement en pâtir. Au bout d’un certain temps, nous ressentons le besoin d’études plus approfondies sur les Saintes Écritures, d’une compréhension plus profonde des dimensions de la croissance spirituelle et d’une compréhension plus profonde des individus. Tous ces besoins incitent les religieux à suivre des cours dans ces domaines.

Pour ma part, je ne suis pas très enthousiaste quand les religieux souhaitent suivre des cours de counseling psychologique, car je crois que le désir de trouver des solutions pour les autres est souvent une manière de se dérober à ses propres conflits intérieurs. Ces cours présentent néanmoins un aspect positif, s’ils requiert un travail sur soi-même. Voilà pourquoi les cours pour formateurs à Bangalore sont si intéressants  : ils demandent aux formateurs d’atteindre un haut niveau de conscience de soi. Le pape François, à Cracovie, l’été dernier, a demandé que nous préparions des prêtres et des religieux capables de faire du discernement et de l’accompagnement, non pas pour donner des instructions aux gens mais plutôt pour les aider à trouver eux-mêmes le bon chemin. Ceci n’est possible qu’avec une conscience de soi critique.

En 2000, nous avons traversé, dans notre Vicariat d’Angleterre, une crise de confiance profonde avec le départ de notre ancien Supérieur provincial, un homme que nous aimions et respections beaucoup. Le sentiment initial de désespoir nous a donné le coup de fouet pour trouver une nouvelle manière de partager et de nous soutenir les uns les autres. Guidés par deux religieuses de la Congrégation Selly Park pendant nos retraites de Vicariat, nous avons mis au point une méthode de partage qui favorise l’entraide, en trouvant de la force dans la faiblesse. Les modalités de ce partage, assimilées au bout de gros efforts, ont été mises en pratique et développées pendant quinze ans, et elles ont donné de nombreux autres fruits : lectio divina, méditation ignatienne, partage sur les lettres de saint Michel, etc.

Dieu nous forme vraiment de manières mystérieuses. Et ceci m’amène à un dernier point : nous ne devrions jamais ignorer la part positive qui se cache dans une crise, afin de saisir l’occasion d’une croissance dans l’esprit. Parfois c’est seulement quand nous sommes désespérés, après un deuil… une période de dépression… un moment d’égarement amoureux… la prise de conscience d’une dépendance… un épuisement nerveuse… que nous nous ouvrons pour recevoir l’aide des autres et qu’une possibilité d formation permanente nous est offerte.

Saint Paul en savait long à ce sujet. Sa supplique à Dieu pour que la douleur lui soit épargnée (2 Cor 12), alors qu’il était très affligé, reçut cette promesse simple : « Ma grâce te suffit, car ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse. ». Les erreurs humaines sont des moments propices pour Dieu. Si nous comprenons ceci, nous serons toujours disponibles pour la formation permanente, qui est un chemin de conversion.

Austin Hughes scj
Supérieur régional

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