Voix du Chapitre général

«  Le XXVIIe Chapitre général qui nous a réunis à San Bernardino a été l’occasion de relire une expérience qui est la vie d’une Famille afin de repartir. Repartir pour nous, c’était sortir, et sortir à la rencontre de la vie », nous dit le P. Sylvain Dansou Hounkpatin, député au Chapitre. Derrière cette relecture se cachent évidemment de longues séances de réflexion, de confrontation, de questionnements et d’inspiration pour l’avenir, dont notre frère nous offre ici une synthèse.

L’évolution rapide du monde aujourd’hui, le contexte historique socioculturel et ecclésial d’une part, les prises de parole du Pape François sur la vie consacrée et sur la vie tout court, ses encouragements à sortir, à oser, à inventer, ses attentes et ses questionnements d’autre part, ont fortement contribué à l’écriture des orientations sur l’animation vocationnelle et l’accompagnement spirituel. Un fait impressionnant : nous étions tous, dans ce groupe, des religieux au service de la formation dans les diverses réalités de la Congrégation. Toute la réflexion est partie d’expériences concrètes vécues ici et là. Tout est parti de notre histoire, de nos histoires et non de nos idées ou projets vagues ou même de nos bonnes intentions. Notre histoire, nos histoires qui sont des expériences, si elles n’ont pas constitué une source de principes dont on pouvait déduire des conséquences, elles ont été une source d’exemples dont on a pu éventuellement tirer des leçons de prudence.

Comme formateurs, nous avons davantage pris conscience que la formation doit être une préoccupation majeure. Etre formateur est une chance et une responsabilité que l’on doit exploiter jusqu’au bout pour le bien de l’Eglise, de notre famille religieuse et des jeunes eux-mêmes. La négliger serait de notre part impardonnable. Cela suppose que nous mettions notre confiance en Dieu. Compter uniquement sur nos propres forces, nos mérites personnels, sur les formateurs bien formés, sur nos structures, nos projets de formation minutieusement préparés (Ratio), c’est se faire illusion. Croyons aussi en Jésus, c’est lui qui appelle. Comprendre cela, désamorcera notre anxiété et nos inquiétudes. Nous vivrons ainsi dans la paix, assurés que Dieu est là qui veille sur notre petite famille religieuse mieux que sur la fleur des champs. Sinon que dire du manque de persévérance vocationnelle des personnes consacrées ? Que penser des sorties précoces après les premiers vœux, la profession perpétuelle ou l’ordination ? Où situer les responsabilités ? Des erreurs de discernement et de sélection ? Des lacunes dans l’accompagnement spirituel ?... Si le cœur est encombré de désirs envahissants, il ne peut capter la voix du Seigneur.

Il y a la nécessité aussi bien pour les formateurs que pour la communauté formatrice, d’aimer le Christ, d’être saisis au cœur par lui. Sans un amour vrai, profond, sincère, il n’est pas possible de donner à notre animation vocationnelle cette qualité supérieure, ce dynamisme qui fait de notre vie consacrée, non un fardeau ni une corvée, mais une offrande d’amour semblable à celle du Christ dont le seul désir était de « faire plaisir à son Père », en lui étant parfaitement soumis, jusqu’à « la mort sur la croix ». Le Chapitre nous a rappelé que l’animation vocationnelle est le fait de tous les religieux (jeunes et aînés). Tous les religieux doivent être en sortie pour l’animation vocationnelle. Les supérieurs doivent stimuler par la force de l’Esprit les communautés pour qu’elles ressentent que le problème des vocations est le leur.

Le Chapitre a encore une fois ouvert grandement nos yeux sur cette réalité fondamentale déjà consignée dans la Doctrine Spirituelle de Saint Michel (DS § 286) : «  La vocation ne peut venir que de Dieu : malheur à l’homme qui s’attribue ce droit ». Nous avons compris en Congrégation aujourd’hui plus qu’hier que Dieu dans sa souveraine liberté appelle quand il veut, comme il veut, et que dans son infinie patience, il attend le moment favorable. If God says Yes, who can say no ? Nous parlons plus aisément des « cas de vocations d’adultes et des candidats ayant fait d’autres expériences religieuses » alors qu’il y a peu de temps encore nous avions un âge limite pour entrer en vie religieuse bétharramite et étions très suspicieux envers des candidats ayant fait d’autres expériences religieuses. La question est désormais pour nous à Bétharram : Comment accueillir ? Il s’agit ici de tous ceux qui frappent à la porte de notre famille de Bétharram. Ici, toute vocation est perçue comme un événement personnel et original et suscitée par le Seigneur. Comment les accueillir ? Selon quels critères ? Quel chemin de formation leur proposer ? Il s’agit là des candidats ayant fait d’autres expériences religieuses. Là, une prudence et un sérieux discernement sont nécessaires. Ici et là, il s’agit d’éveiller les candidats (jeunes et adultes) à vérifier, à la lumière des trésors de l’expérience de saint Michel Garicoïts dans la recherche de la volonté de Dieu (méthode pour connaître la volonté de Dieu), l’éventualité d’un appel et la beauté du don total de soi-même à la cause du Royaume.

C’est bien dans ce sens que vont les propositions concrètes des actes. Si Bétharram est une petite famille, elle est appelée à « grandir ». C’est le grain de sénevé qui doit devenir un arbre à l’ombre duquel les oiseaux viendront faire leurs nids. Avec courage, promouvons l’animation vocationnelle, afin que tous ceux qui sont effectivement appelés découvrent le don précieux que le Seigneur veut leur faire en raison d’une prédilection spéciale, et dans la famille de Bétharram.

Sylvain Dansou HOUNKPATIN,scj