Vie de la Congrégation (1)

Au cœur du processus de formation, le discernement est une question fondamentale pour nos formateurs. Accompagner un jeune dans le discernement de sa vocation, une lourde responsabilité. Le P. Daniel González scj, maître des novices de la Région P. Auguste Etchécopar, témoigne de la réalité de cette mission, en nous proposant quelques points de repère, utiles à tous puisque le discernement est l’affaire de chacun, à toutes les étapes de son cheminement.

La question qui m’est posée ne porte pas, j’entends bien, sur ce qu’est le discernement et ses différentes étapes, mais bien sur l’expérience que j’en ai. Question difficile, à laquelle je ne suis pas sûr de savoir répondre, d’autant moins par écrit !

Accompagner un jeune sur son chemin de discernement, dans sa quête sur la finalité de sa propre existence, c’est toute une aventure. Comme toute aventure elle génère des attentes, des émotions, de l’enthousiasme ; elle lance des défis, interpelle, oblige à confronter des choix faits par le passé avec la façon dont on les vit maintenant. C’est un véritable itinéraire de formation et de croissance, y compris pour l’accompagnateur.

On a parfois envie d’ôter ses sandales et de s’agenouiller devant la terre sacrée que représente chaque personne, tout comme on éprouve le désir de contempler, de louer Dieu et d’exulter devant sa création et son travail dans la créature. On est parfois aussi tenté, reconnaissons-le, de “manipuler” le buisson qui brûle dans la vie d’un jeune ou au contraire de renoncer à l’accompagnement dont on est chargé.

Pour chacun de ces voyages, j’emporte dans mon sac à dos quelques convictions qui m’encouragent et me guident :

1. Dieu veut se révéler, et il est le premier à souhaiter notre épanouissement. Par conséquent, si le jeune est honnête dans sa quête, il ne peut pas ne pas le rencontrer.
2. Dieu, qui nous a créés, poursuit son œuvre dans sa créature. Il s’agit donc de savoir découvrir.
3. Ce voyage ne peut se faire que si le jeune éprouve un véritable désir de Dieu, que si son cœur est généreux, sa volonté forte et si l’argile dont il est fait est encore assez humide pour être modelée.
4. Le jeune homme est le protagoniste de cet itinéraire ; mon rôle se limite à l’accompagner et à lui proposer des éléments qui lui permettent de réaliser son parcours.
5. Pour qu’il y ait discernement, il faut que le jeune soit animé d’une vie intérieure, qu’il vive une rencontre personnelle avec le Seigneur, qui se manifeste dans la vie quotidienne, dans la Parole, dans l’Eucharistie…

Si tout cela est présent, le chemin est joyeux, même si des difficultés surviennent et s’il arrive qu’il s’allonge. Pour ma part, j’essaie d’accueillir le jeune, de l’écouter et de lui fournir les éléments nécessaires, puisés dans la méthode de saint Michel pour trouver la volonté de Dieu, dans les règles de discernement de saint Ignace, dans la Parole... Dans les connaissances acquises sur le développement de la personne… Dans ce que les autres ont fait avec moi...

Si je ne perçois pas chez le jeune ces convictions, mais au contraire un manque de droiture, d’honnêteté, ou si je constate que le jeune a déjà pris sa décision et ne se prête pas à ce travail de recherche, ou si je sens que l’argile a durci..., je suis en mesure de dire qu’il est difficile, voire impossible, de réaliser un véritable processus de discernement ; car l’Idoneus (l’humanité du jeune) est à certains égards “endommagé”, ce qui ne permet pas d’être Expeditus (libéré), donc de choisir ce qui conduit au but pour lequel il a été créé, Expositus.

Dans ce cas de figure, il faudra tout d’abord essayer de comprendre et d’aider à mettre à jour le problème, afin de fournir ensuite tous les éléments pour le résoudre et mettre au point un itinéraire personnalisé. Dans certains cas, il sera nécessaire de recourir à un professionnel en psychologie et/ou en psychiatrie. Le cas échéant, ce processus peut avoir lieu en même temps que le discernement vocationnel, mais il faut alors être très vigilant au moment des choix, notamment des décisions définitives que, pour ma part, j’aurai quelques scrupules à accepter.

Quelques signes d’un bon processus de discernement :

1. Un jeune conscient de soi, de ses dons et de ses faiblesses ; avec une saine autonomie ; doté d’un esprit ouvert et du désir de croître ;
2. Un jeune qui a découvert son appel personnel, son identité et sa mission. Un jeune qui sait être protagoniste de sa vie, à partir de sa vocation spécifique et avec sa marque personnelle.
3. Un jeune homme qui fait de sa vie intérieure le centre de sa vie.
4. Un jeune ouvert et capable de répondre à Dieu et à la réalité qu’il est appelé à vivre.
5. Un jeune qui aime Bétharram en tous points et s’identifie avec son charisme et sa mission.
6. Un jeune formé dans l’art du discernement  ; et, en bon bétharramite, capable d’accompagner les autres.

Daniel González scj
Maître des novices