Expériences

Humour et compassion : les deux faces d’une même médaille ?

Depuis plusieurs années, nous tenons notre retraite annuelle des Companions bétharramites au Widney Manor, propriété des missionnaires de St Colomban à 30 km au sud-est de Birmingham. Un intervenant extérieur anime la journée. Cette année pourtant les choses se sont passées un peu différemment : pour des raisons imprévues, le Widney Manor n’a pu nous accueillir et étant tombé malade, notre intervenant, n’a pu nous rejoindre. C’est le père Austin qui a « écopé » du soin d’animer la journée, et ce dans un environnement familier. En effet, nous nous sommes réunis dans la bibliothèque du prieuré d’Olton. Sans doute le P. Austin méritait-il du coup un surplus de compassion de notre part et j’étais tentée de lire dans cet arrangement un trait d’humour de Dieu.

La journée a débuté agréablement avec l’arrivée à Olton d’environ 40 personnes chargées d’un magnifique assortiment de mets en vue du partage du repas de midi. Les pères, frères et laïcs de Bétharram venaient des paroisses d’Olton, Balsall Heath, Great Barr, Droitwich, Leigh et Whitnash. Après le plaisir de retrouvailles chaleureuses et quelques rafraîchissements, nous avons pris place en cercle pour commencer notre journée de réflexion. Il était bon de laisser derrière nous nos soucis et d’avoir la perspective d’une journée de prière, d’espoir, d’amitié et de réflexion.

Le père Austin nous a tout d’abord précisé qu’il comptait s’attacher à deux aspects de l’amour exprimé par Jésus : celui de la compassion et celui de l’humour. Nous avons réfléchi en premier lieu au besoin d’amitié que nous avons en famille, en communauté, dans l’Eglise, etc., et à l’importance de vivre dans un esprit de communauté avec les autres. Nous devons nous rappeler qu’aucun de nous n’est parfait. Nous avons tous des défauts, et nous devons accepter que les autres en aient aussi. Nous ignorons l’histoire personnelle de chacun. Aussi nous ne devons juger personne. Nous sommes amenés cependant, au cours de notre vie, à faire de rapides jugements. En ces occasions, nous devons faire preuve de compassion. Nous avons tous besoin de quelque chose. Les lettres de St Michel sont pleines de compassion - il parlait des personnes comme de “brebis sans berger” -, mais son amour n’était pas seulement sentimental. Il confrontait les gens aux conséquences de leurs actions. Il lui était nécessaire parfois de manifester un “amour rude”. Il était très ferme mais il transmettait de l’amour. C’est l’amour qui émane du Sacré Cœur - amour compatissant qui vient du Père à travers le Fils. C’est un point essentiel dans la compréhension bétharramite de l’amour de Jésus dans le Sacré Cœur en opposition à ceux qui interprètent le Sacré Cœur avant tout comme un instrument de réparation du péché. La remarque a été faite que Michel Garicoïts ne nous a laissé aucun livre, mais uniquement des lettres, et c’est pourquoi le charisme bétharramite s’est transmis de génération en génération surtout à travers l’exemple.

Durant le repas de midi, nous avons pu bavarder avec les laïcs d’autres paroisses tout en savourant les mets délicieux qui nous étaient proposés. Cette possibilité de rencontrer des companions d’autres zones géographiques est une des richesses de nos journées de récollection.

Dans l’après-midi nous avons considéré l’humour de Dieu en faisant référence à l’Ancien et au Nouveau Testament. Les psaumes nous ont donné une idée de l’humour de Dieu - Ps 2,4 Nb 22:28… « Alors le Seigneur ouvrit la bouche de l’ânesse. » L’humour de Dieu est un humour discret qui ne se moque pas des gens.

Nous avons réfléchi au fait qu’il est rare de voir une image d’un Christ riant. Pourtant, c’est une amusante image qui nous a été proposée comme icône pour notre partage. Nous avons aussi remarqué que les évangiles nous parlent de Jésus pleurant, priant, se mettant en colère, partageant, etc. Il vivait tous les aspects de la nature humaine mais à aucun endroit dans les évangiles nous ne l’entendons rire. Cela a pourtant dû lui arriver. Il existe des passages humoristiques dans les évangiles : « Peut-il venir quelque chose de bon de Nazareth ? », etc.

Ste Thérèse d’Avila aurait dit : « Une nonne triste est une triste nonne ». Humour et rire sont des éléments essentiels dans une communauté et rapprochent les individus.

Notre journée s’est conclue par la messe du deuxième dimanche du Carême proposant la Transfiguration comme lecture des évangiles. Cette journée de récollection a produit en nous de nombreux fruits spirituels. Nous avons quitté Olton renouvelés dans la joie et prêts à retourner aux affaires du monde après avoir partagé ensemble une journée merveilleuse. Merci père Austin !

June Arran